

Une loi locale de 1873 utilisée par les rectorats d’Alsace-Moselle
déclarée contraire à la Constitution
Ce mercredi 2 juillet 2025, le Conseil constitutionnel a déclaré contraires à la Constitution certaines dispositions de la loi d’Empire du 12 février 1873 sur l’enseignement et l’ordonnance qui s’y rattache, à la suite d’une Question prioritaire de constitutionnalité (QPC) posée à la demande de deux écoles Waldorf mises en demeure en 2024 par le rectorat alsacien de se conformer à ces dispositions, toujours en vigueur en Alsace-Moselle. Ces textes prévoient qu’une « autorisation de l’État est nécessaire » pour « engager un maître dans une école » privée, et que la délivrance de cette autorisation doit s’appuyer sur « l’aptitude » ainsi que « les bonnes vies et mœurs » de la personne présentée.
Cette question prioritaire de constitutionnalité a été posée à l’occasion d’un recours pour excès de pouvoir contre l’administration déposé par les écoles Mathias Grünewald à Wintzenheim et Waldala à Wittelsheim. Des difficultés de dialogue avec le rectorat n’avaient pas permis un échange constructif en amont, afin d’assurer une prise en compte de matières spécifiques liées à la pédagogie Steiner-Waldorf, telles que les travaux manuels, l’atelier bois ou l’eurythmie, puisqu’elles n’entraient pas dans les catégories prévues par l’administration pour délivrer des autorisations préalables d’enseigner.
Maître Vincent Brengarth, qui a défendu cette QPC le 24 juin dernier lors d’une audience devant le Conseil des Sages, avait argué qu’en raison du caractère imprécis de ces dispositions, celles-ci laissaient un trop grand pouvoir d’appréciation au rectorat pour délivrer ces autorisations et ouvraient la porte à l’arbitraire, mettant en péril les garanties légales encadrant cette restriction de la liberté de l’enseignement.
Dans sa décision rendue le 2 juillet dernier, le Conseil constitutionnel indique qu’ « en faisant référence, sans autre indication, à l’« âge » et aux « bonne vie et mœurs » de la personne présentée, les dispositions contestées permettent à l’administration de faire obstacle au recrutement d’un maître sur le fondement de critères dont la portée est imprécise. D’autre part, ces dispositions ne sont pas limitatives et ne font dès lors pas obstacle à ce que l’administration refuse le recrutement d’un maître sur le fondement d’autres critères. » Le Conseil constitutionnel conclut dès lors que « le régime d’autorisation qu’instaurent les dispositions contestées est, en tout état de cause, insuffisamment encadré. Il en résulte que, par leur imprécision, les dispositions contestées privent de garanties légales la liberté de l’enseignement. »
La Fédération Pédagogie Steiner-Waldorf se réjouit que le Conseil constitutionnel se soit prononcé en faveur de la défense de l’Etat de droit, qui impose que la limitation d’une liberté publique soit entourée de garanties légales suffisantes.
C’est dans cet esprit que la Fédération appelle également à une clarification des critères régissant les inspections académiques afin d’éviter tout arbitraire. De plus, une information des inspecteurs au sujet des diverses propositions pédagogiques alternatives leur permettrait de comprendre les pratiques observées. Enfin, au nom du principe de transparence, les rapports d’inspection devraient être systématiquement communiqués aux établissements et accessibles au public.