Stéphanie Desfontaines
Coach, consultante Parent d’élève
“Je suis maman de trois filles scolarisées dans l’école Steiner de Chatou depuis douze ans. Régulièrement, je lis dans la presse des articles sur les écoles Steiner qui ne reflètent pas la réalité de ce que j’expérimente depuis dix ans, en particulier les articles incluant des interviews de M. Grégoire Perra ou le long article du Monde Diplomatique de l’été 2018 sur l’École du Possible à Arles. Je comprends que l’on puisse trouver cette pédagogie différente, c’est bien le cas ; que l’on puisse parfois être étonné par ce qui se passe dans les écoles, notamment par l’eurythmie qui est difficile à appréhender, bien sûr !
Ce que je ne comprends pas, c’est que certains journalistes n’approfondissent pas leur enquête. Très souvent, il y a très peu de confrontation de points de vue et l’article reste fort superficiel. Très souvent, les articles témoignent d’une forte subjectivité : les conclusions relèvent davantage d’une interprétation personnelle que d’une réelle exigence intellectuelle à faire éclore une forme de vérité. Je n’ai connu les écoles Steiner que dans ma vie d’adulte. Enfant, j’ai suivi un cursus dans une école “classique”. J’ai fait des études très classiques aussi, une classe préparatoire et l’école HEC, qui ne prédisposent pas à sortir des modèles en place. Mon environnement personnel ne me prédestinait pas à mettre mes enfants dans cette école. Donc je me suis beaucoup renseignée avant d’y inscrire mes enfants. J’ai demandé à une orthophoniste de trente ans d’expérience d’aller rencontrer des professeurs pour partager son avis sur la pédagogie. Elle m’a dit : “C’est exactement cela qu’il faut faire pour enseigner aux enfants, et si toutes les écoles le faisaient, nous, les orthophonistes, n’aurions plus de travail”.
Depuis douze ans, j’ai connu un nombre important de professeurs différents à l’école de Chatou, je me suis impliquée dans la vie de l’école et je crois bien la connaître. Je trouve les attaques répétées dans la presse tout à fait injustifiées. J’ai cherché à comprendre pourquoi ce monsieur Perra disait tant de mal de l’école, avec autant d’énergie, de détermination, de régularité, et j’ai compris que son expérience d’enseignant dans l’école de Chatou, au début très positive pour tout le monde, avait évolué au détriment de certains élèves et qu’il était peut-être en colère d’avoir été contraint de quitter l’école. Il est surprenant que le travail journalistique (en tous cas celui que j’ai observé pour l’instant) n’ait pas permis de mettre à jour cette histoire compliquée de M. Perra avec l’école, pour relativiser ses propos.
L’information n’est en effet pas difficile à trouver. Je ne doute pas qu’un jour un journaliste ait envie de relever ce défi, s’intéresse à ce “cas” des écoles Steiner dans la presse. De mon côté, je ne peux que témoigner d’une école saine, avec ses qualités et ses défauts comme toutes les écoles, mais en aucun cas caractérisée par les dérives graves qu’on lui prête, notamment de prétendues dérives sectaires. Une secte cherche à priver les personnes de leur liberté, à manipuler, à s’enrichir. En tant que parent, j’observe une école qui ouvre l’esprit, qui fait gagner les enfants en liberté, en autonomie, qui leur montre un champ de possibilités et de réalités beaucoup plus vastes que ce qui existe dans les écoles des amis de mes enfants, de mes neveux et nièces, des enfants de mes voisins. Cela ne correspond pas du tout aux accusations portées. Je suis tout à fait disposée à partager davantage mon expérience avec quiconque en ferait la demande.”