Repensons l’éducation des jeunes enfants

Moins d’exercices, plus de jeux ?

La chercheuse Dale Farran est spécialisée dans l’éducation de la petite enfance. Dans une récente étude de grande ampleur (début 2022), rapportée dans un article paru sur le site de la National Public Radio des Etats-Unis1, elle a, avec d’autres chercheurs, suivi 2900 enfants (de familles à faibles revenus) de 4 ans (l’âge d’entrée au « prekindergarten program » dont l’article parle) jusqu’à la 6ème classe (11-12 ans aux Etats-Unis). Quels ont été les résultats de cette étude ? Qu’ont-ils montré sur les besoins du jeune enfant et la meilleure façon d’y répondre ?


Dans cette étude, des familles (le critère de sélection étant la pauvreté) ont postulé pour que leur enfant âgé de 4 ans soit admis dans l’un des “prekindergartens” publics et gratuits de l’état du Tennessee. Une procédure de type loterie a décidé quels enfants seraient admis et ceux qui ne le seraient pas. Ceux-là sont du coup, pour leur grande majorité, restés à la maison. Il y avait donc deux groupes déterminés par le hasard : une  étude contrôlée randomisée, la plus fiable des méthodologies pour mener une expérience.

Le programme de maternelle – prekindergarten était supposément parfaitement adapté pour répondre aux besoins de ces enfants et leur donner de bonnes bases pour leur permettre par la suite de mieux réussir à l’école : un programme validé comprenant 5,5 heures de cours par jour (en langue et mathématiques), des enseignants qualifiés formés à la petite enfance et des classes à petit effectif.

Les chercheurs s’attendaient à voir des effets positifs. Or, la surprise de l’étude a été de constater que les enfants qui sont allés à la maternelle « prekindergarten » ont, en 6ème classe, de plus mauvais résultats en mathématiques, en science et en lecture, contre toutes attentes !

Pourquoi ? Quelles explications les chercheurs proposent-ils pour expliquer ce résultat ?

La première est dans le type de programme qui est proposé dans ces maternelles – prekindergartens publiques. Les enfants s’y exercent à tracer des lettres, à écrire des nombres, et l’on y attend des enfants qu’ils s’assoient et écoutent le professeur. Dale Farran pensait que « les enfants pauvres avaient besoin d’une autre sorte de préparation que les enfants de familles aux revenus plus élevés » pour réussir par la suite.

La chercheuse observe que les familles plus aisées choisissent pour leurs enfants des écoles basées sur le jeu libre, où l’art, le mouvement, la musique et la nature ont toute leur importance. Et où les enfants sont écoutés.

Elle en tire donc la conclusion que, contrairement à ses attentes, une école où l’enfant est libre de jouer serait certainement adapté pour tous les enfants, quel que soit leur milieu.

Dans les jardins d’enfants Steiner Waldorf, qui accueillent tous les enfants de 3 ans (parfois 2 ans et demi) à 6 ans, ces derniers sont libres de jouer, d’explorer, de bouger, d’expérimenter avec tous leurs sens, de se lier à la la nature. Chants, comptines, rondes, jeux dansés, histoires, jeux de doigts… sont proposés quotidiennement et sont le support idéal pour travailler le langage à ces âges-là.

La pédagogie Steiner Waldorf pour le jeune enfant repose sur le jeu libre

Un autre résultat de l’étude montre l’importance de l’aménagement des lieux : que les espaces soient conçus pour les jeunes enfants, avec les sanitaires à proximité, la possibilité de manger dans la classe, un bel espace extérieur avec des équipements prévus pour les enfants.  Quiconque est déjà rentré dans un jardin d’enfants Steiner Waldorf a remarqué que les lieux et l’ambiance sont pensés pour répondre aux besoins du jeune enfant, tel que le décrit l’article.

La conclusion de la chercheuse suite à ses recherches rejoint le manifeste publié par des pédiatres sur le site du Figaro : « Pourquoi mettre autant de pression sur nos programmes de prekindergarten ? Nous pourrions en fait obtenir de meilleurs résultats en laissant les petits enfants jouer ».

Notes